La vie au grand air, un magazine sportif
Le 20 novembre 1903, une revue présente en couverture la photo d'un certain S-.F Cody à son arrivée dans le port de Douvres. Il s'agit de La vie au grand air, magazine sportif créé le le 1er avril 1898 à l'initiative de Pierre Lafitte. D'abord journaliste à l'Écho de Paris et dans diverses revues cyclistes, Pierre Lafitte se lance rapidement dans l'édition. Il produit en l'espace de quelques années plusieurs revues dont : La Vie au grand air (1897), Musica (1902), Femina (1903), Je sais tout (1905), Fermes et châteaux (1906), et Excelsior (1910). Il édite aussi, dans une collection bon marché, les aventures d'Arsène Lupin et de Rouletabille et se fait le précurseur de l'édition pour enfants en créant une collection cartonnée et illustrée en couleur.
À ses débuts bimensuelle, La Vie au grand air devient hebdomadaire, voit une interruption de publication entre août 1914 et juin 1916 pour finalement disparaître en 1922. En effet, par manque de rentabilité de l'Excelsior, Pierre Lafitte se voit contraint de céder à Hachette ses revues et ses locaux.
Buffalo Bill à Calais?
C'est la Vie au grand air qui l'affirme : "le capitaine S.-F. Cody, le fameux Buffalo Bill, l'ex-roi des Cow-boys vient de trouver une nouvelle façon de traverser la Manche. L'histoire est plausible, William Frederick Cody alias Buffalo Bill est à Paris lors de l'exposition universelle de 1889 et il entame ensuite une tournée dans différentes villes de France. Souvenons-nous de l'article d' Éric Klein cité en source dans la publication sur Barnum & Bayley.
source Buffalo Bill Center oh The West
Le magazine nous annonce donc Buffalo Bill, mais en réalité, il s'agit de Samuel Franklin Cody (né Cowdery)1 qui cultive volontairement la ressemblance physique et vestimentaire avec William Cody : des cheveux longs, barbe et moustache, bottes de cuir, long manteau et chapeau en permanence sur la tête. Selon les occasions il affirme, ne détrompe pas ou laisse entendre qu'il est le fils de Buffalo Bill, Buffalo Bill lui-même ou un parent.
La vie de ces deux hommes présente d'ailleurs beaucoup de similitudes à commencer par des arrangements avec leur biographie, voire la théâtralisation de leur propre histoire, mais aussi le goût de l'extraordinaire, de l'inédit et celui du gigantisme des spectacles à l'instar de Phileas Taylor Barnum. Ils ont été chercheurs d'or, cavaliers et tireurs émérites, auteurs et acteurs de théâtre, organisateurs et hommes de spectacles notamment sur le "wild west" qu'ils font découvrir à l'Europe et bien d'autres choses encore.
Une traversée en cerf-volant
Deux versions - romancées elles aussi - circulent quant à la passion de Samuel Cody pour les cerfs-volants. La première nous raconte que grâce à un cuisinier chinois, il a appris à faire voler des cerfs-volants lors de déplacements sur la route du bétail.
La seconde donnée par un chef mohawk à un journaliste dit ceci :
À une occasion, alors que Cody était dans une ville du Lancashire avec son spectacle Wild West, son fils Leon est allé dans la rue avec un cerf-volant en forme de perroquet. Leon était vêtu d'une chemise rouge, d'un pantalon de cow-boy et d'un sombrero, et bientôt une foule de gosses en sabots claquaient derrière lui. "Si un garçon peut intéresser une foule avec un petit cerf-volant, pourquoi un homme ne peut-il pas intéresser toute une nation ?" pensa Cody - et c'est ainsi que s'est développée l'idée des cerfs-volants qui soulèvent l'homme.
Quoi qu'il en soit, le voilà bien décidé à traverser la Manche en ce mois de novembre 1903 à l'aide d'une petite embarcation légère tirée justement par les fameux cerfs-volants qu'il a créés. En 1901, il a déposé un brevet pour l'un de ses modèles qu'il à proposé à l'armée Anglaise et qu'il pense être utile en cas de conflit. il décide donc dans un premier temps de faire la traversée dans le sens Angleterre-France 2, mais le vent ne lui est pas favorable. Il va alors, comme pour un spectacle, faire la promotion de sa venue à Calais fin octobre en véritable "showman". Et dès le lendemain de son arrivée, les journalistes du quotidien Le Phare de Calais ne le quittent plus et rendent compte de chacun de ses essais faisant monter le suspens.
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La vie au grand air dans son article du 19 novembre 1903 nous livre les photos et détails des manœuvres. La réussite de Cody lui vaut d'être pris au sérieux par l'armée britannique qui l'embauche en 1905 comme "instructeur de cerf-volant". Il peaufine ses modèles, en invente d'autres. En 1907 il fabrique un cerf-volant motorisé de 10,5 m d'envergure et participe à la construction du Nulli Secundus, premier dirigeable anglais. Mais ce sont les avions qui désormais l'intéressent et le 16 octobre 1908, il devient un pionnier de l'aviation en étant le 1er à faire voler un avion britannique sur le sol britannique.
Sur cette photo prise en 1909 à la chambre des communes du Royaume-Uni, il pose avec ses camarades aviateurs Français et Anglais. À sa droite Louis Blériot qui, deux mois plus tôt, a été le 1er à réussir la traversée de la Manche en avion.
source Reddit
Malgré l'abandon des militaires qui ne croient pas au futur de l'aviation, il continue son projet et crée le Cody N° 1C surnommé "la cathédrale volante". En août 1913 alors qu'il pilote son dernier appareil, un hydravion, il se tue près de Farnborough, non loin de la Manche. Lors de son enterrement avec les honneurs militaires, près de 100 000 personnes viennent lui rendre hommage sur le parcours vers le cimetière d'Aldershot.
Françoise Dubois
Références
- 1 Texas State Historical Association - TSHA
- 2 "La grande épopée de la traversée de la Manche", Albéric de Palmaert, éditions du Rocher
- "La Vie au grand air, journal de tous les sports" -Retronews
- "La vie au grand air, édition du 20 novembre 1903" - Collection F.Dubois
- "Samuel Franklin Cody" - Cerf-volant ancien
- The Cody war kite - www.rafmuseum.org.uk - photocopie d'un livre au format PDF
- "Qu’auriez-vous joué ?" - Levallois Mémoires - Le blog des archivistes de la Ville de Levallois
- Buffalo Bill's Wild West Show. 1898, 1902, 1910 - video
- Le Phare de Calais - Médiathèque de Calais
Termes et conditions
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